Appartient au cycle : Une société en quête d’elle-même ?

La crise de la société contemporaine
Une société en quête d'elle-même

Résumé :

“Avec l’effondrement des régimes totalitaires en Europe de l’Est et la pulvérisation de l’idéologie marxiste-léniniste, depuis longtemps cadavérique, on a chanté partout le triomphe du capitalisme et de la “démocratie” représentative. Quelques années après, le caractère creux de ce triomphe apparaît à tous. L’économie capitaliste dans les pays riches reste empêtrée dans ses problèmes -chômage, alternances d’inflation et de déflation, énormes gaspillages de toutes sortes- et les poches de misère s’y gonflent. La mondialisation de l’économie ne profite, provisoirement, qu’à quelques pays du sud-est asiatique, aux régimes politiques peu recommandables, alors que l’Afrique noire continue de s’enfoncer dans le chaos. La situation de l’environnement devient constamment plus menaçante. La décomposition des mécanismes de direction politique, en cours depuis longtemps, s’alourdit du fait que l’Etat, à la suite de la victoire du “libéralisme” déchaîné, se dépouille progressivement lui-même des quelques moyens de régulation qui avaient été établis pendant le demi-siècle précédent. Le système politique, profondément atteint par une corruption devenue systémique, ne suscite que l’apathie et le cynisme des populations. Il est devenu manifeste que la “représentation” ne représente qu’une infime couche de potentats économiques, politiques et médiatiques. La crise de l’éducation s’aggrave pendant que se succèdent avec une monotonie lassante les réformes du système éducatif. Le feuilleton télévisé est devenu l’emblème de la production culturelle. Derrière ces symptômes -qui deviennent à leur tour des causes- se tient la crise profonde des significations imaginaires qui avaient défini l’époque moderne. L’imaginaire capitaliste, imaginaire de l’expansion indéfinie d’une prétendue maîtrise prétendument rationnelle, commence à étouffer sous ses propres productions : pollution et destruction de l’environnement, atrophie de la socialisation des êtres humains, inanité des valeurs seulement économiques, disparition du sens comme ciment de la société. L’imaginaire de l’autonomie individuelle et collective, qui avait nourri les mouvements démocratiques et révolutionnaires, traverse une éclipse prolongée. Telle est la situation qui appelle à un nouvel effort de réflexion philosophique et politique et dont la prise de conscience est condition de tout renvoueau de la volonté et de toute action lucide.” (Cornelius Castoriadis)

Date

12 décembre 1996

Publié le 16/01/2007

Thématique

Notes

Conférence inaugurale au cycle à l'occasion de la publication de "La montée de l'insignifiance" (Le Seuil, 1996).

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