Restituer l’Histoire : table ronde entre les intervenants
Trente ans d'écrivains

Dominique Viard réinterroge les quatre auteurs de cette rencontre sur plusieurs aspects de leur travail, notamment formels. D’abord sur l’importance de l’humain dans la restitution de l’Histoire, ce que confirme Didier Daeninckx qui rappelle l’émotion qu’il a ressentie à la lecture de “Premier combat” de Jean Moulin et de la description très quotidienne qu’il donne de la résistance et de la Libération. Chez Emmanuel Darley, le personnage est plus traité comme une figure, et l’Histoire est polyphonique, racontée par plusieurs voix. S’il ne revendique pas spécialement d’influences littéraires, il relève l’importance de son expérience théâtrale sur son écriture. Pour Soazig Aaron, la polyphonie est aussi une nécessité formelle afin d’alléger l’écriture du récit. Enfin, Frédéric Léal a utilisé un procédé formel marqué pour séparer la narration du récit historique, la première étant très orale, tandis que le second est lié à l’écriture. La forme du fragment, des énoncés que Frédéric Léal introduit à la fin de l’ouvrage est aussi, pour Didier Daeninckx qui l’a employée dans “Meurtres pour mémoire”, une façon de dire que l’Histoire est lacunaire mais qu’elle reste encore accessible. Sur la forme de la narration, Didier Daeninckx explique également que si “Itinéraire d’un salaud ordinaire” suit une chronologie linéaire, il a pourtant été construit sur la même base que ses autres romans : la rencontre avec l’Histoire, en l’occurence la découverte via un article du Monde, que les Renseignements généraux l’observaient. A partir de cette découverte, il a accumulé la documentation sur ces services, découvrant à la fois leur permanence au sein de l’Etat et leur archaïsme. Le travail sur les archives est naturellement un autre élément important de la littérature historique et Soazig Aaron s’est appuyée sur de nombreux documents, ce qui lui a permis de découvrir notamment la taxe de compensation perçue par l’Etat français sur les achats des biens spoliés. Ce sont ces histoires dans l’Histoire, peu traités par le discours historien, qui forment la matière de l’oeuvre littéraire.

• Programme du troisième volet du cycle